lundi 19 septembre 2016

"TOUCHEZ PAS AU PLAZA" : le projet culturel


Du Plaza au Barrio (del Cine)

On a déjà à plusieurs reprises soutenu ici le mouvement ("Touchez pas au Plaza" :
https://www.facebook.com/groups/1447065642251760/)  qui s'est créé pour sauver la salle de cinéma "Le Plaza" de la démolition projetée par son propriétaire. Il y a à cette volonté de maintenir cette salle, la plus belle de Genève, des motivations patrimoniales. Mais il y a aussi une volonté culturelle. Le choix de maintenir ou non la salle du Plaza renvoie en effet à un critère d'utilité publique : l'utilité publique du projet des propriétaires l'emporte-t-elle sur celle du projet des défenseurs de la salle, comme lieu culturel ouvert au public ? la motivation du propriétaire est financière, et son critère est celui de la rentabilité : il considère que la salle n'est pas rentable, que la rentabilité des autres éléments de l'ensemble "Mont-Blanc Centre" ne doit pas être prise en compte pour compenser la non rentabilité de la salle de cinéma, seul élément déclassé (pour des motifs financiers) de l'ensemble créé par l'architecte Saugey, et qu'il a donc lui, le propriétaire, un droit fondamental à se débarrasser de la salle, alors que nous considérons, nous, qu'il y a une utilité publique évidente à la maintenir en tant que lieu culturel plutôt qu'en un centre commercial de plus.

" Retrouver le plaisir de voir des films dans ces espaces chargés d'histoire" (Frédéric Maire, directeur de la Cinémathèque Suisse)

Le projet culturel qui justifie, en sus de la défense d'un patrimoine architectural unique, le maintien du Plaza et son reclassement, en cohérence avec l'ensemble architectural (classé) auquel il appartient, est celui d'un "quartier du cinéma", organisé autour de la salle, et combinant programmation, caractère du lieu, qualité de l’accueil et des infrastructures et requalification des espaces alentour.  Il s'agit, en créant un quartier culturel, de créer un lieu de rencontres donnant ou redonnant au public  l’envie de le fréquenter : "on se rend compte que le public a envie de retrouver le plaisir de voir des films dans ces espaces chargés d'histoire", écrit, à propos du Plaza, le Directeur de la Cinémathèque suisse, Frédéric Maire. Le Plaza est idéalement situé pour un tel projet,  au coeur d’un quartier, proche de la gare, dans lequel les possibilités de requalification des activités sont nombreuses, et nombreuses aussi  les possibilités d' interactions entre les différents espaces du complexe, jusqu’à ce jour totalement indépendants les uns des autres, une salle d’exposition, des locaux administratifs, la réactivation de la brasserie et du bar glacier existants, autour d'une salle devenant  la salle de prestige de la ville.

La qualité spatiale de la salle du "Plaza", sa situation, son plein-pied avec le trottoir, en font non seulement un élément spatial sans pareil, mais aussi un élément idéal comme élément central d'un "quartier du cinéma", où le cinéma ne serait d'ailleurs pas exclusif, et qui pourrait être un lieu de rencontres et d'usages multiples, adaptable aux évolutions de la demande (et en particulier aux évolutions technologiques). La salle, en effet, fait partie d'un ensemble cohérent (et classé), dont il fut absurde, et dangereux, de sortir un élément dont on reconnaît la qualité patrimoniale, mais qu'on déclasse -qu'on prive de protection contre sa démolition, pour la seule raison que son propriétaire n'arrive pas à le rentabiliser

Le projet culturel d'un "quartier du cinéma" est, avec la volonté de maintenir parce qu'elle  le mérite en tant que telle la salle du Plaza, l'élément essentiel du caractère d'utilité public du maintien de la salle et de refus de sa démolition.  Dès lors qu'il y a utilité publique à la maintenir, la volonté du propriétaire de s'en débarrasser parce qu'elle n'est pas rentable passe au second plan. Et ce qui passe au premier plan, c'est, en tant que projet d'utilité publique, le projet culturel que portent les défenseurs de la salle. Ce projet culturel et le reclassement de la salle du Plaza (déclassée pour pouvoir être démolie) sont ainsi  des conditions réciproques : les autorités ne reclasseront la salle que si un projet solide leur est présenté pour son utilisation (et cela vaut à plus forte raison pour le peuple, s'il devait être consulté), et la réalisation de ce projet suppose le reclassement de la salle. Ce reclassement dépend d'une décision du Conseil d'Etat. On n'attend donc du gouvernement genevois qu'il fasse un choix de préférence  : empêcher la démolition d'une salle unique pour la remplacer par un centre commercial de plus.
Et dans ce choix,  si l'existence d'un véritable projet culturel pour la salle sera déterminant, c'est parce qu'on ne se bat pas seulement pour la beauté d'une salle : on se bat aussi pour qu'il s'y passe quelque chose, qui ne ne passe pas ailleurs.
Et ne se passera jamais dans un centre commercial.