samedi 5 décembre 2015

MAH : la campagne pour la votation du 28 février est lancée



Pas de doute, on est à Genève...

La campagne pour la votation municipale du 28 février sur la rénovation et l'agrandissement du Musée d'Art et d'Histoire de Genève lancée. Des deux côtés : celui des partisans du projet Nouvel-Jucker, celui de ses opposants. Et ce ne sera pas vraiment être un combat gauche contre droite et réciproquement, puisque de la gauche et de la droite, on en trouve côté  "oui" comme côté "non". Côté "oui", aux côtés du MCG,  du PLR et du PDC, on trouve le PS. Côté "non", aux côtés de l'UDC (et des Verts libéraux en prime), on trouve "Ensemble à Gauche" et, tardive recrue ralliée avec pas mal d'hésitations (ils avaient refusé de soutenir le référendum), les Verts. Le Cercle de soutien au projet rassemble des gens de droite et de gauche, les organisations de défense du patrimoine qui combattent le projet rassemblent des gens de gauche et de droite. Le PDC, le PLR et le MCG qui passent leur temps politique à exiger que la Ville "réduise sa voilure" et son budget, notamment son budget culturel, acceptent une augmentation de 20 % des charges du musée (charges assumées parla Ville), les Verts et Ensemble à Gauche qui dénoncent le financement du projet par Jean-Claude Gandur se retrouvent à le combattre aux côtés de Stéphane Barbier-Muller... Bref, pas de doute : on est à Genève...


Dix questions pour un projet muséal

Dans la lettre que comme chaque année on a envoyé au Père Noël (on y croit puisqu'on est de gauche...), avec la liste des cadeaux qu'on veut recevoir, il ,y avait ceux qu'on demande chaque fois et que ce vieil abruti ne nous amène jamais (le pouvoir absolu, la richesse illimitée, l'amour définitif, tout ça...), il y avait cette année le "Projet scientifique et culturel du Musée d'Art et d'Histoire de Genève". Et voila-t-y pas qu'on annonce qu'il va,  incessamment sous peu, nous être présenté ? Le Père Noël existe donc. Et il se cache quelque part entre les hallebardes et les mousquets de la salle des armures du MAH... Alors, en attendant de pouvoir lire, analyser, commenter ce projet, et de nous prononcer sur son contenu, résumons les dix principales questions que nous nous posons à son propos (il en est d'autres auxquelles nous attendons réponse, mais pour le moment, contentons-nous de celles-là, posées sur la
page Facebook de questionnement : MAH : quel musée, pour quoi faire, quoi dire, et à qui ?  https://www.facebook.com/MAH-quel-musée-pour-quoi-faire-quoi-dire-et-à-qui--727942464004871/)

1. En quoi la réalisation du projet "Nouvel-Jucker" d'extension du MAH est-elle indispensable à la réalisation d'un nouveau "projet scientifique et culturel" (PSC) pour le musée ? Est-il vraiment inconcevable de réaliser ce PSC sans cette extension ? Et ne court-on pas après une "modernisation" du musée, de son enveloppe, de sa démarche, de son projet, qui serait déjà dépassée le jour de l'inauguration du "nouveau" musée ?

2. Le projet d'extension du MAH est-elle réellement l'une de ces opportunités de faire "bouger les choses" quand à la définition du rôle même du musée ?

4. On estime à près de 10'000 le nombre de nouveaux musées qui s'ouvriront dans le monde dans les cinq prochaines années. Pour qui, ou  pour quoi, sont-ils faits ? Les musées sont-ils fait d'abord pour les objets, les oeuvres, qu'ils contiennent, ou d'abord pour le public, ou d'abord pour les scientifiques, les historiens, les spécialistes du champ qu'expose le musée ?

5.
N'est-ce pas toujours une forme muséale "usée que l'on tente au MAH de rénover, en même temps que le musée -alors que la question qui désormais se pose est de savoir si le dispositif muséal, les musées en tant que tels, ne sont pas des survivances obsolètes, du point de vue même de leurs missions traditionnelles (la conservation et l'exposition du patrimoine, la recherche scientifique, la diffusion des connaissances) ?

6.
Quant le MAH, dans ses "éléments pour un Projet culturel" (octobre 2014) assène qu'"un égal intérêt de tous les publics à l'égard de tous les sujets n'existe pas plus qu'un langage universel de médiation" (entre ce qu'expose le musée et le public), que faut-il comprendre ? que le musée va raconter à chaque visiteur l'histoire que le visiteur a envie d'entendre et que le musée suppose que le visiteur est capable de comprendre ?

7.
Sur l'ensemble des oeuvres et objets qu'il conserve, le MAH actuel ne peut en exposer que 1,5 %, faute de place. Le projet Nouvel-.Jucker prévoit de rendre possible l'exposition de 8 % des collections, y compris celles d'horlogerie et d'instruments anciens de musique. Comment se fera le tri entre ce qui sera exposé et ce qui ne le sera pas ? Peut-on mesurer la qualité d'un musée à la proportion exposée de ses collections ? Le nouveau Musée d'ethnographie ne peut toujours montrer, dans son expo de référence, qu'un peu plus de 1000 de ses 80'000 pièces -en est-il dévalué pour autant ?

8.
"Les musées sont amenés, depuis une vingtaine d'années, à jouer un rôle croissant -et actif- dans le développement culturel et économique de leur région", écrit le MAH dans une première réponse, en janvier 2015, à la motion de la gauche réclamant que le contenu culturel du projet d'extension du musée soit exprimé. Pour autant, peut-on attendre (et faut-il espérer) du MAH qu'il puisse, avec le projet Nouvel-Jucker d'extension, devenir à Genève ce que le Guggenheim est devenu à Bilbao : le motif d'un séjour de la ville ?

9.
A un Conseiller municipal l'interrogeant, lors des "Etats généraux des musées genevois" (octobre 2013) sur l'articulation des rôles des institutions publiques et des acteurs privés (comme la Fondation  Gandur), le directeur du MAH, Jean-Yves Marin, a répondu : "On ne délègue rien. Si on nous propose un partenariat, il faut se poser les questions de façon analytique. Nous avons la main et nous devons servir et protéger l'intérêt public. Mais nous ne devons pas nous priver de l'intérêt privé". Après avoir posé "de manière analytique" les questions que suggèrent le partenariat entre le MAH et la Fondation Gandur pour l'Art, partenariat codifé dans une convention, quelles réponses peut-on apporter à ces questions ?

10.
"Il n'y a plus une pensée, un geste, un produit de la culture existante qui témoigne d'une compréhension de notre époque. La culture est réduite à zéro !", proclamait en 1959 la "section hollandaise de l'Internationale Situationniste" -pour qui "La culture se situe là où finit l'utile" : c'est la "part maudite" de Georges Bataille -donc lorsque tout doit être utile, plus rien ne peut être "culturel", pas plus un musée qu'une bibliothèque, un cinéma ou un orchestre... Alors, pourquoi rénover et agrandir un musée, qu'y mettre, et qui y convier ?

11.
Enfin, puisque l'on part d'un musée existant (le MAH actuel), qu'est-ce qui caractérise ce musée, quelle est son identité, sa personnalité, son originalité, sa spécificité par apport à un autre musée ou un autre équipement, qu'est-ce qui définit son image et fait que le public viendra le visiter plutôt qu'un autre musée ?  Quel est son rôle dans la cité ?

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