dimanche 4 mars 2007

Une innovation lithurgique : le sacrifice du bouc émissaire pendant l'Avent

Le 16 janvier 2007, le Conseil de fondation du Grand Théâtre a invité le Conseil administratif à limoger le secrétaire général du GTG, Antonio Soragni, de son poste de Secrétaire général, charge à la Ville de le recaser ailleurs.
Or le Conseil de fondation n'a été saisi de l'exigence du directeur général de licencier Antonio Soragni (1) qu'après l'avoir apprise par la presse -et avoir pu lire que le Conseil lui-même formulait cette exigence, alors qu'il n'en avait pas même été saisi.

En réalité, le 19 décembre, alors qu'une réunion du Conseil de fondation venait de se terminer (sur un vote de confiance, acquis à la quasi unanimité, à l'égard du directeur général), le bureau du Conseil s'est réuni, sans informer le Conseil de la teneur de cette réunion abrupte. Le bureau a à ce moment là, en l'absence du Conseiller administratif Mugny, décidé tout seul de demander au Conseil administratif, comme l'en priait le directeur général (qui posait le départ du secrétaire général comme une condition de la poursuite de son propre mandat), de licencier le secrétaire général. En procédant ainsi, le bureau mettait à la fois le Conseil de fondation et le Conseil administratif devant le fait accompli. On se contentera pour tout commentaire de saluer l'innovation lithurgique consistant à introduire le sacrifice du bouc émissaire dans les fêtes de Noël.

On ne fera croire à personne qu'il aura fallu sept ans (2) au bureau du Conseil de fondation, et au directeur général, pour se rendre compte que le secrétaire général du Grand Théâtre n'était pas la bonne personne au bon poste. Ou alors, ce n'est pas de l'incompétence d'Antonio Soragni dont il aurait fallu débattre, mais de l'incompétence, individuelle et collective, de ceux qui ont attendu six ans, trois crises et le lancement de deux audits pour ouvrir les yeux.
Le Conseil de fondation n'avait d'ailleurs pas à prendre une décision de licenciement alors que ses motifs avancés relevaient pleinement du champ de l'audit lancé un mois avant. En tant que signataire du protocole d'audit, la fondation du Grand Théâtre s'engageait à ne pas en préjuger les conclusions : faut-il déduire du licenciement, transformé en déplacement par le Conseil de fondation (3), d'Antonio Soragni que la fondation ne s'était résignée à l'audit que parce qu'elle ne pouvait faire autrement ?

Succédant au départ à Paris du directeur technique, précédant l'annonce par le président et le vice-président de la fondation qu'ils ne solliciteront pas le renouvellement de leur mandat fin août prochain, le "déplacement" du directeur général confirme l'impression persistante que les instances du Grand Théâtre font sauter les uns après les autres les fusibles dont elles disposent -à cette précision près que, contrairement à une opinion généralement répandue, ce n'est plus la direction générale qui tente de se protéger du court-circuit en faisant "sauter les fusibles", mais le Conseil de fondation lui-même, met plus précisément encore son bureau. L'actuelle direction générale n'a en effet pas eu le choix du secrétaire général et du directeur technique : elle les a trouvés l'un et l'autre en place à son arrivée (2), comme elle a hérité d'une situation et d'un fonctionnement auquel on peut certes lui reprocher (pour le moins) de n'avoir pas mis fin, mais certainement pas de les avoir institués.
Le Conseil de fondation étant supposé être l'organe "suprême de la fondation", il doit en assumer suprêmement toutes les décisions importantes, même les plus calamiteuses : ça n'est pas la direction générale qui a refusé de recevoir les syndicats quand il était encore temps de les recevoir, de les écouter et de désamorcer la crise en réglant les problèmes qui l'ont provoquée : c'est le Conseil de fondation. La direction générale avait certes alors invité le Conseil à l'autisme, mais le Conseil pouvait parfaitement ne pas la suivre.

(1) En réalité, il s'agissait de demander au Conseil administratif de licencier Soragni : il n'est en effet pas de la compétence du Bureau du Conseil de fondation, ni du Conseil lui-même, de licencier le directeur général, lors même que celui-ci est sous contrat de droit privé avec la fondation, car l'engagement du directeur général est signé par le Conseil administratif (même si le choix de la personne est du ressort du Conseil de fondation).

(2) Antonio Soragni, alors membre du Conseil de fondation (au titre de représentant des Verts) a été engagé en 1999 comme secrétaire général du Grand Théâtre, à la succession de François Duchêne, à l'initiative du président d'alors de la Fondation, Guy Demole, du Conseiller administratif d'alors, Alain Vaissade, la direction générale étant alors assumée par Renée Auphan. Il semble qu'il y ait eu d'autres candidatures que celle d'Antonio Soragni, sans que le Conseilo de fondation en ait été valablement informé.

(3) Lors d'un vote assez curieux : invité d'abord à se prononcer sur la proposition du bureau de licencier Antonio Soragni, et après que le président et le vice-président aient mis leur démission dans la balance du vote, le Conseil a refusé (par six voix contre trois, moyennant une abstention) cette proposition. Il n'a qu'ensuite accepté (par six voix contre deux et moyennant deux abstentions) la proposition de "déplacement" d'Antonio Soragni vers un autre poste, au sein de la Ville de Genève (opportunément transformée en office de réadaptation professionnelle des anciens cadres du Grand Théâtre), avec garantie intégrale jusqu'à fin juin 2008 du salaire perçu comme secrétaire général du GTG, soit environ 400'000 francs (charges comprises) pour un an et demi.

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